Zoépolis

Designers chercheurs

"  Le zoédesign c’est tisser les fils de l’habitabilité avec et pour les autres êtres vivants "

Atelier de design fiction - crédit Zoépolis

Introduction

Zoépolis est un collectif de designers, chercheurs et designers-chercheurs dédié à l’exploration d’un design avec et pour les êtres vivants non-humains.

Son nom provient du grec « zoé » qui signifie « ce qui est commun à tous les vivants, plantes animaux mais aussi dieux, déesses, fantômes et esprits » et « polis » qui signifie « la cité et le territoire dans laquelle elle est ancrée (forêt, terres agricoles,...) »

Pour cette interview, Design Makes Sense a eu le plaisir d’accueillir plusieurs membres du collectif : Violaine, designeuse spécialiste du biomimétisme ; Nicholas, biologiste ; Eve, graphiste radicale :) ; Morgane, photographe et designeuse et enfin Nicolas, designer et fondateur du collectif.

Naissance du collectif

Le collectif Zoépolis a été créé en 2021, et compte aujourd’hui environ 96 membres regroupés autour d’un noyau dur d’une vingtaine de personnes.

Une majorité d’entre eux sont designers ou graphistes mais le collectif compte également dans leurs rangs de nombreux illustrateurs, artistes, anthropologues, biologistes, vétérinaires et sémiologues.

Ensemble, ils interviennent sur différents types d’actions. Tout d'abord, ils mettent au point des outils et des méthodologies qui permettent de décentrer notre regard et notre travail de designer pour inclure dans notre design les êtres vivants non-humains. Cela peut prendre par exemple, la forme de recherche théorique et méthodologique, de recherche graphiques, d’un atelier varié d’une approche pragmatique jusqu’au design fiction  

Le deuxième type d’actions est la mise en place effective de ces outils dans le cadre de projets menés en partenariat avec des villes, des métropoles, des universités, ou dans le cadre de projets européens.

Atelier de design fiction - crédit Zoépolis

Axes de recherche

Leur recherche est partagée en 5 axes :

  • Le design centré humain intégrant les vivants non-humains

Dans cet axe de recherche, est exploré un design centré usager qui intègre la perspective d’autres êtres vivants. L’objectif est toujours de répondre à un besoin humain mais grâce à l’intégration des êtres vivants non-humains. Le design biophile ou les solutions fondées sur la nature sont de bons représentants de cette approche.

On peut prendre l’exemple de la réduction du stress et de l’absentéisme au travail par l’intégration de plantes ou par la présence d’animaux ; cela aura pour effet secondaire de redessiner notre considération et nos relations avec d’autres espèces ainsi que la transformation de nos organisations du travail en terme de lieu, de temps et de mobilité. 

  • Le design centré vivant non-humain

L’objectif, cette fois-ci, est de dessiner le monde humain en prenant comme point de départ les besoins des non-humains. En deux mots, donner le gîte et le couvert aux autres espèces vivantes.

Zoépolis a ainsi réalisé une enquête avec la métropole de Lyon, sur leur système de gestion du bois coupé et sur les transformations qu’il faudrait mettre en place afin que ce système n’entrave pas le bon développement d’une des larves qui vit dans ce bois. Au-delà des larves d’insectes, c'est tout un réseau trophique qui bénéficie du soin accordé à la sauvegarde du bois mort dans la ville (selon l’ONF c’est 25% de l’écosystème forestier qui tient au bois mort).

  • Le design centré sur les relations interspécifiques

De la même manière que le design des politiques publiques repense et redessine les relations entre les différents acteurs de la vie publique, ici ce sont les relations entre humains/animaux, humains/plantes ou humains/écosystèmes qui sont explorées.

Parmi les projets réalisés par le collectif, nous y retrouvons les assises des pollinisateurs ou bien le projet de Marine Beacon, qui trace l'impact des activités humaines en situant les interdépendances entre les techniques de pêche employées et l’impact des captures accidentelles d’espèces menacées sur les écosystèmes marins. Il s'agit ici d’une plateforme numérique ouverte au grand public, qui rend visible un espace de débat créé entre différentes parties prenantes : scientifiques, pêcheurs et autres parties prenantes comme des ONG ou bien des organes de gouvernance pour s’accorder sur les mesures à prendre afin d’éviter les prises accidentelles.

  • Le design de la médiation des vivants, des écosystèmes et de la biosphère.

La représentation est un enjeu-clef dans le travail du collectif. Cet axe de recherche est donc consacré à rendre visible l’invisible ce qui est invisible ou difficilement accessible à nos sens au moyen de différents outils : graphisme, scénographie, data visualisation, design d’information…

Cela consiste par exemple en un travail de vulgarisation et de représentation de données scientifiques, la compréhension des enjeux sur un projet ayant pour thème « les captures accidentelles de  dauphins ».

  • Le design des nouveaux imaginaires

Un autre enjeu essentiel est celui de repeupler nos imaginaires. Les membres du collectif m’exposent à quel point nos imaginaires se sont appauvris, et notre capacité de penser et de représenter la nature également.

Ils m’expliquent que cela fait suite à la baisse de notre expérience partagée avec la nature, notamment du fait de nos modes de vie, de plus en plus urbanisés. Mais aussi, suite à la baisse drastique des représentations auxquelles nous sommes confrontées, dans les livres pour enfants ou dans les films d’animation par exemple.

Le nombre d'espèces différentes a ainsi grandement reculé, on en note, par exemple, 26 dans le Pinocchio de 1940, et une seule seulement dans les Indestructibles. Dans les livres pour enfant, des études ont montré que lorsque les espèces sont représentées, ce sont le plus souvent des espèces exotiques et non des espèces locales.

En réponse à cette problématique, le collectif participe à élargir la représentation des non-humains dans les imaginaires des designers et du grand public notamment grâce à l’utilisation du design fiction. 

3e Assises des pollinisateurs

Actions menées

En réponse à ces axes de recherche, le collectif mène différentes actions.

On peut citer par exemple les ateliers de design fiction proposés par Mirabelle & Morgane. Dans ces ateliers, elles amènent le grand public à se projeter dans le futur de la ville de Lyon, où le végétal tiendrait une place bien plus importante. Cela leur permet de réfléchir aux conséquences positives (ex. baisse de la température) et négatives (ex. plus de moustiques) de ce changement, et aux différentes manières de les appréhender.

De la même façon, ils utilisent leurs compétences variées (design fiction, graphisme) pour contribuer à d’autres projets ou d’autres luttes. Ils ont conduit, par exemple, des ateliers sur le déclin des pollinisateurs lors des troisièmes assises des pollinisateurs avec 200 personnes ou toutes les parties prenantes étaient représentées. Les participants étaient répartis en 4 milieux (urbain, zones protégées…) et devaient dégager des leviers d’actions pour permettre une meilleure prise en compte des besoins des pollinisateurs dans ces différents milieux. Avec 70 agents de la ville de Lyon, ils ont fait un atelier prospectif sur la biodiversité du territoire de 2030 à 2125

Le collectif est également amené à enseigner et à partager leurs projets dans de nombreuses écoles. Cela leur permet de faire connaître leurs travaux, d’initier les étudiants à leurs outils mais aussi d’accompagner certains étudiants dans la rédaction de leur mémoire sur des thématiques liées au design pour les non-humains.

Enfin, et de plus en plus, ils réalisent des prototypes pour tester leurs solutions à destination des non-humains. C’est le cas par exemple de l’arbre à lierre, une installation qui prend en compte les spécificités du lierre et de son écosystème (ex. il produit peu de racines ; il fleurit deux fois par an et a un impact fort sur la biodiversité en ville…). Une jardinière centrée essentiellement sur les insectes sera prototypée prochainement dans un fablab de l’Ain.

Structure pour lierre

La suite ?

Le collectif accueille aujourd’hui ses premiers salariés, grâce au soutien de la Fondation de France et par le biais de sa nouvelle association Zoétopie qui contribue à la recherche et à la coordination des projets du collectif.  

Il souhaite également continuer à construire une boîte à outils composée de méthodologies et d’outils qui permettraient de faciliter la prise en compte par tous les designers des êtres-vivants non-humains dans leur design. Prochainement, plusieurs formations sur leurs méthodologies seront proposées. Ils travaillent aussi à une université d’été. Aussi, leur veille sera mise gratuitement à disposition de tous au cours de l’année 2025.

Enfin, ils souhaitent chercher de nouveaux terrains d’expérimentations, et concrétiser plus fréquemment les phases d’expérimentation et de prototypage. En effet, ils rencontrent encore des blocages avec certaines collectivités pour développer les idées issues de la phase d’idéation.

Si leur travail vous intéresse et que vous souhaitez vous engager à leurs côtés, n’hésitez pas à les contacter à collectif.zoepolis@gmail.com. Le collectif est ouvert à tous et ils se feront une joie de vous accueillir.



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